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Les évasions de Léandre Boizeau... J21


Léandre Boizeau vous parle de son quotidien casanier, mais l'esprit vagabond...

Le créateur des Ronchons, personnages du fameux musée qui foulent les planches du Berry depuis près de quatre ans, ne pouvait rester sans voix, pas plus que ses comédiens d'copains.

Depuis le " jour 1 ", il ne manque pas de temps pour laisser ses pensées divaguer et faire " chonchonner " nos Ronchons préférés.









 

Le jour où j’ai gagné la course des Hérolles

Eh oui, mes amis confinés,

je n’ai pas toujours fait que du vélo d’appartement comme c’est la mode actuellement !


Il m’est arrivé de faire de grands périples en compagnie de mes Amis Cyclos Blancois.

Sur le plat, j’étais plutôt bien.

Dès qu’on abordait les « bosses », j’étais moins fringant.

Ne parlons pas de la montagne où, à chaque fois, je me retrouvais dans le « gruppetto – balai », en compagnie de Jean et de Nounours, deux grimpeurs - comme moi - totalement " désailés ".


Je me suis même essayé à faire des courses et là, il fallait du courage !

Commencer une carrière de coureur cycliste à 35 ans, voilà qui est osé. L’apprentissage a été très dur. Le cyclisme est un sport exigeant : il faut s’entraîner, mais aussi savoir aller jusqu’au bout de ses forces et quand tu y es rendu, il faut aller au-delà.



Ce sport, si facilement décrié par ceux qui ne l’ont jamais pratiqué à cause du dopage qui a nui à son image, est une école de courage et de volonté.

Ce que j’ai pu souffrir pour terminer ma première course !

Bon dernier, mais sacrément content de moi quand même !

Avec quatre kilos et demi en moins sur la bascule à l’arrivée ! Ce qui me valait ensuite des nuits agitées au cours desquelles j’étais capable d’engloutir un gros pot de confiture et un kilo de fromage blanc pour l’accompagner.

Fallait être fou me direz-vous !

Certainement, mais j’assume.

Cette folie-là ne m’était pas imposée comme elle l’est maintenant à ceux qui tournent en rond dans leur tête et leur salon.


Partant très tardivement dans la compétition, je ne nourrissais pas de grandes ambitions, mais je m’accrochais. J’arrivais souvent dans un peloton d’attardés, mais j’arrivais et je me disais que le jour où je ne serais pas décroché, je pourrais peut-être disputer une place vu que j’étais « vite au sprint ».

Ma seule qualité, mais je l’avais !

Je m’étais donc engagé au Prix des Hérolles qui devait se dérouler un dimanche de juin 1982. Réservée aux 2ème et aux 3ème catégories dont je faisais partie, cette course dont je ne connaissais pas le parcours ne m’inspirait pas vraiment.

Pour plein de raisons.


La première étant que j’étais à peu près certain de ne pas pouvoir me préparer en suivant le rituel habituel :

pâtes et blanc de poulet, gâteau de riz, trois heures avant le départ .

En effet, le matin, je devais accompagner une délégation de militants de la cause de Mis et Thiennot auprès de RBS (actuelle France Bleu Berry) qui se refusait obstinément à programmer « Pour Raymond et Gabriel », la chanson écrite par Rolland Hénault et chantée par Babette.

Nous étions neuf, dont Rolland, et nous investissons donc les bureaux de la station.

Le mot d’ordre est simple :

« Nous ne bougerons pas d’ici tant que vous n’aurez pas passé la chanson sur l’antenne d’RBS ! »

Simple mais pas facile à faire admettre.

Les deux journalistes présents, visiblement dans l’embarras, bottent en touche. Ils ne sont pas en mesure de prendre une telle décision qui engage la station et nous le font savoir. C’est à ce moment qu’arrive l’homme providentiel : le directeur. Je crois me souvenir qu’il s’appelait Monsieur Sire.

Il écoute nos doléances avec attention, mais n’a pas du tout l’intention de nous donner satisfaction.

Bon, d’accord, il va nous falloir coucher là !

C’est ce que nous faisons savoir en prenant position sur les bureaux. Moi, ça ne m’arrange pas du tout vu que j'ai bien l'intention de faire la course dans laquelle je me suis engagé l’après-midi mais je suis bien obligé de suivre, voire même de précéder le mouvement.

La situation va finalement se débloquer sur le coup de midi, quand le directeur prend l’engagement de passer « Pour Raymond et Gabriel » dans la semaine si nous quittons les lieux.

L’accord est acceptable, nous libérons la place.

Rolland Hénault et moi, nous n’y reviendrons pas de sitôt vu que nous utilisons des méthodes de voyous pour parvenir à nos fins. Interdits d’antenne pendant au moins deux ans ! Ah, mais !


Nous sommes plutôt satisfaits de l’action que nous venons de mener, me reste un problème à résoudre :

il est midi et demi, je suis à Châteauroux,

il faut que je regagne Le Blanc pour y prendre ma femme, mon fils…

et mon vélo avant de repartir tout de suite pour Les Hérolles où le départ est donné à 15 heures.

Pas le temps de manger - j’avale un sandwich - pas le temps de me masser, ni de m’échauffer en reconnaissant le parcours.


Nous sommes une bonne cinquantaine sur la ligne, dont Jean-Marie, mon frère. Coup de sifflet et c’est parti pour trois tours de vingt kilomètres.

On n’avait pas fait cinq bornes qu’une première difficulté se présente, une jolie bosse montée à un train d’enfer. Et ce qui devait arriver arriva : je suis largué.

Je revois le regard navré de Jean-Marie qui grimpe mieux que moi mais ne peut évidemment pas m’aider. En haut de la côte, j’ai un trou de près de cent mètres à boucher.



Écœuré, je n’y crois pas trop, mais, par principe, je m’accroche. Et là, heureuse surprise, je réussis à recoller au peloton !




Je me souviens en avoir éprouvé une vraie joie.

Stupide peut-être, mais c’est comme ça.

Mais je ne vais pas avoir le temps de me réjouir très longtemps : en voilà une autre qui se profile, même tempo, même résultat. Et contre toute attente, je réussis à revenir pour la seconde fois !

Là, ce n’est plus de la joie, c'est presque du bonheur !

Il y avait donc deux bosses importantes sur le circuit et trois tours à parcourir. J’ai été largué six fois ! Et six fois je suis rentré ! Au courage.

La dernière fois, c’était à deux kilomètres de l’arrivée. Je rejoins la queue du peloton, je le remonte jusqu’aux toutes premières positions. Arrive le dernier faux plat de l’arrivée, je me colle dans la roue de Daniel Besnard, un garçon de Bélâbre et je le passe d’une demi roue sur la ligne !


Vainqueur du prix des Hérolles après avoir été largué six fois !



- Injuste ! ont dit certains.

- On s’est fait avoir ! ont dit d’autres.

Je n’ai entendu personne dire qu’il m’avait fallu un zeste de volonté pour en arriver là. Mais rien ne pouvait gâcher ma joie.

Pas même ce satané sandwich qui m’a fait savoir après l’arrivée qu’il ne s’entendait pas du tout avec mon estomac.

Ce soir-là, croyez-moi, j’ai fait un sacré réveillon : confiture et fromage blanc au menu !

Allez, cessons de rêver,

il est l’heure de faire mes quinze bornes sur mon vélo d’appartement…

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