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Confinés avec Jérémy Bouquin #15

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C'est le moment de feuilletonner...

L'auteur berricho-tourangeau Jérémy Bouquin l'a bien compris et vous entraine dans un polar sombre, en temps réel.


 

Un feuilleton polar, créé spécialement pour le Confi-blog de La Bouinotte… C’est le pari, avec ce roman noir planté du côté de Levroux, dans l’Indre, dont il va nous livrer un épisode chaque jour.


Pas de titre pour le moment. A vous de trouver !! On attend vos propositions sur notre mail : la-bouinotte@orange.fr, ou sur les réseaux sociaux de La Bouinotte.


Jérémy Bouquin
Autodidacte, réalisateur de  courts et moyens-métrages, Jérémy Bouquin est auteur de romans  policiers, nouvelles noires. Il a participé à deux recueils de nouvelles  black Berry, éditions La Bouinotte. Sous l'alias Jrmy, il est scénariste de la Bd polar Le Privé. Mais dans "la vraie vie", Jérémy est  travailleur social.

Son site : http://jrmybouquin.free.fr

 


Épisode 15


Bordel de merde.

Charly dégage d’office son Glock, s'aligne le long de la porte.

Réflexe quasi militaire. Il se fixe le temps d'analyser complètement la situation et réagir à la moindre opportunité.

Préparé mentalement, physiquement, il garde son sang-froid, contrôle son souffle, garde l’index le long du canon, pas sur la détente. Pas de tremblement. Juste une légère décharge d’adrénaline.

L’odeur de la poudre qui remonte, la sensation des zones de guerre, des théâtres d’opération, il est dans son élément.

La voiture se gare.

Une Renault Talisman. Haute de gamme. Un gros son aussi qui gronde, les basses à fond sur un Hip Hop saccadé, Redman, un américain à la mode, son dernier album : Revenge the dreamers 3. Le morceau tourne un moment, la voiture est pourtant à l’arrêt. Charly tente de voir, se redresse de quelques millimètres. Le chauffeur, une silhouette. Il a l’air dans la musique, il tape du poing sur son volant, il chante, oui, il chante…

Cela laisse le temps.

Charly se décale alors en arrière, entre-ouvre une des portes qui donnent sur le laboratoire… se glisse dans la dizaine de centimètres de passage, pour ramper vers l’une des tables. Au sol, le carrelage, gras et poisseux, l’ancien légionnaire se tire jusqu’à la fenêtre et se relève dans un angle sombre.

La musique s’arrête.

Le téléphone sonne, kit main libre, l’autre décroche : « Oui gros… comme tous les jours, pas de souci, j’ai déposé. C’est comme ça… y’a moins mais t’inquiète. Oui… Oui… Ouaiche. Ciao ! Tocard ! »

Gilda avait parlé d’une sorte « racaille de fromager ».

Le type a l’accent des cités, celles des quartiers de la région parisienne, rien à voir avec la gouaille du titi de Pigalle, là, on a droit au relou des halls d’immeubles.

Il ouvre enfin la portière.

Charly le détronche. Direct. Il ne lui faut que quelques secondes pour enregistrer son visage, un jeune, la trentaine maxi, longiligne, veste de jogging, collier imposant plaqué or, petite moustache de maquereau lissée et les cheveux plaqués en arrière, une partie du crâne tondu.

Style Gangsta'rap en plein Berry.

Bagouse au pogne, grosses sneackers à la mode, les dernières de chez Puma, des RS-X, mais repeintes, tunnées à la mode, en mauve. Grosse montre, pas forcément connectée, signe extérieur de richesse, largement assumé !

Là, on a un caïd.

Là, on a fromager du Bronx. Bordel. Délire.

Il ferme la voiture, cherche ses clés dans la poche trop lâche de son Adidas, lui aussi siglé équipe de France. Il porte un nom dans le dos, Tiny III.

Certainement pas un joueur de foot, mais son blase à lui. Tiny. Pour Antoine ? Charly l’observe aller chez lui, il ouvre la porte. Là, le bidasse entend un son qu’il n’aime pas, mais pas du tout. Un grognement.

Putain.

Un clébard.

Et pas n’importe quoi, visiblement… Un gros clébard bien des cités lui aussi : pitbull.

- Alors mon beau ! On vient voir papa…

Le pit, lui, vient de repérer une autre odeur. Il gronde.

- Junior ! Du calme.

Tiny comprend pas sur le moment, il tente de lui prendre le collier, lui voudrait se rentrer, mater la télé, se pieuter. Mais le clébard lui vient de repérer un intrus, une odeur surtout.

- Tu me fais quoi là, mon bébé ?! T’as encore vu une souris… Il le tient. Mais vu la tension du chien, il comprend bien qu’il y a un autre truc.

- Y'a du monde ?

Le chien aboie alors.

Merde… Charly n’a jamais aimé les clébards, jamais… surtout ceux-là. Des saloperies de clebs, rien à voir avec des ratiers ! Ceux-là, ils te chiquent à la moindre occasion, dès qu’ils ont une proie dans la truffe, ils ne lâchent pas. Une fois dans les crocs, ils te dévorent la cuisse en moins de deux.

Charly doit se barrer.

Aller dans le fond, sortir par devant, c’est se faire repérer, il s’enfonce dans le laboratoire, va plus vite, un moment, il tape dans une table, manque faire tomber un pichet, se retourne et tape dans une gamelle.

- Y'a du monde ! Tiny vient d’entendre ! Y'a du monde ?

Qu’il beugle. Il s’approche, maintient toujours le chien, il a entendu le raffut dans la grange, il va pour ouvrir la porte.

- Oh ? Y'a qui ?

Silence.

Charly est confiné dans un recoin, le Glock aligné sur la porte, il l’ouvre, il lui balance une cartouche. Il attend. L’autre reste derrière la porte. Tiny est malin, très malin…

- T'es qui mec ? Balance ton nom, avant que je te lâche mon cadeau, mon mignon.

Il est juste derrière la porte qui donne sur le corridor.

Charly lui en repère une autre… Une devant, qui donne sur ce qui semble être une chambre froide. Il a alors une idée !

Il va pour tirer la poignée. Ouvre. Trouve des paquets par dizaines, rien qui ne ressemble vraiment à du fromage, mais plutôt à des poudres, une forte odeur de vanille qui vient lui monter à la tête.

- Mec ! Je vais lâcher Junior ! Alors rends toi !

Au même moment la porte s’ouvre, le chien se précipite. Tiny n’a pas le temps de comprendre qu’il se prend deux balles qui sifflent juste au-dessus de sa tête. Il se plaque au sol, la porte se referme aussitôt sur lui et claque.

Le pitbull fonce sur Charly, qui lui balance d’un revers une plaque en acier à la tronche, le fait dévier. La pauvre bête ne s’attendait pas à prendre un couvercle dans la gueule. Charly enchaine par un autre coup sur le flanc, et donne un coup de pied dans la porte de la chambre froide. Qui se claque sèchement.

A peine le temps d’emprisonner le clébard, que derrière, Tiny ouvre la porte à nouveau. Il tire encore deux bastos dans les charnières. Pour le forcer à reculer. Charly a juste le temps de voir un canon. Putain ! Il a un gun.

Tiny va pour tirer.

La troisième balle tape à deux millimètres de sa tête. Le « rappeux », racaille fromagère, se retrouve alors déstabilisé quelques secondes, le temps pour Charly de balancer le couvercle en métal dans la vitre en face et de se lancer dans un saut droit, avec réception maladroite dans un buisson juste en face.

Derrière, Tiny qui ouvre, hurle à la mort, tire droit devant sans réellement se rendre compte que Charly est déjà passé par la fenêtre. Il vide son chargeur, un gros calibre, canon nickelé, qui fait vibrer les vitres.

- T’es où salope ! T'es où ? qu’il braille.

Il déboule dans le laboratoire.

Cherche un moment. Tape dans le gourbi avant d’allumer la lumière de la pièce. Il trouve son chien dans la chambre froide…

Plus personne.

- T’es où ?

Charly est déjà arrivé à la l’embranchement de la route, pas loin du bois. Le temps que grimper dans le Qashqai et de se poser.

Il devine qu’à quelques secondes près, s’en était terminé.

Dire qu’une racaille fromagère aurait pu le buter !

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