Chaque jour, Léandre Boizeau vous parle de son quotidien casanier, mais l'esprit vagabond...
Le créateur des Ronchons, personnages du fameux musée qui foulent les planches du Berry depuis près de quatre ans, ne pouvait rester sans voix, pas plus que ses comédiens d'copains.
Depuis le " jour 1 ", il ne manque pas de temps pour laisser ses pensées divaguer et faire " chonchonner " nos Ronchons préférés.
Curieuse atmosphère !
On n’entend rien ou plutôt on entend tout : les motoculteurs qui, au loin, se répondent de jardin en jardin comme autrefois les « Hue – Dia », les taille-haies qui besognent et, mieux encore, les oiseaux qui chantent.
Oui, les oiseaux chantent ! Et se déplacent en toute impunité d’arbre en arbre !
Les veinards ! Pour une fois...
Ce matin, j’ai même entendu mon voisin qui butait ses asperges. C’est qu’elles aussi ont décidé de continuer à vivre comme si de rien n’était et il leur en faut de la vigueur pour sortir des ténèbres. Il leur en faut de l’espoir, de la volonté et de l’optimisme pour franchir l’obstacle quasi insurmontable que l’homme met sur son chemin. Un bel exemple à méditer en ces temps incertains.
J’en suis là de mes réflexions, moi le vieux confiné par décret, quand j’avise mes massifs de tulipes. Une splendeur ! Je crois qu’ils n’ont jamais été aussi réussis. Et ça c’est une invitation au rêve, à la joie de vivre, au rire. Je ne vais donc pas m’en priver : c’est promis, à partir d’aujourd’hui je ne regarde plus les journaux télévisés et les débats dits « politiques ». J’en ai marre de leurs têtes d’enterrement et de leurs vêtements de deuil. Comme casseurs de moral, ils s’y entendent trop bien ceux-là !
Donc c’est fini, désormais je me tourne résolument vers mes Ronchons de la Bouinotte, une espèce de secte du rire déjanté et du confinement joyeux.
Allons droit au but !
Vous savez tous qu’à Saint-Ricart, le Maire a décidé de créer un musée des autochtones pour sauvegarder l’espèce en voie de disparition.
Des autochtones, il y en a cinq :
le Jeannot, l’Francis, le Michel, le Dédé et le Guitout
mais seuls les trois premiers ont été retenus par le Maire et le Conservateur pour figurer dans le musée. Ce qui n’est pas sans poser problème.
D’autres personnages, Françoise, la « visiteuse de potager », Jacques Moineau et Philippe Gredin, les deux « techniciens » ne manquent pas de faire savoir sans détour ce qu’ils pensent. Ce qui donne au final une communauté où la paix n’est pas souvent à l’ordre du jour. En un mot, ça vit et plutôt intensément.
Tout ce beau monde n’a pas manqué de réagir au premier jour de la mesure de confinement.
Francis a fait savoir qu’il préférait être confiné que con fini.
Michel lui a répondu que l’un n’empêchait pas l’autre.
Jeannot, en bon footeux qu’il a été, a dit qu’il était très préoccupé par la suspension du championnat de foot.
Francis s’est rangé à son avis tout en reconnaissant que les footballeurs qui n’arrêtaient de glavioter partout avaient fait leur mal eux-même.
Dédé et Guitout ont beaucoup échangé sur l’arrivée massive de parisiens chez les Ploucs, mais ont convenu qu’ils n’étaient pas gênants et que ceux-là, au moins, ne pesteraient pas sur le chant du coq et les odeurs de bouse.
Comme à leur habitude, les Ronchons se sont donc exprimés sur tout
et de préférence sur rien.
Aujourd’hui, Monsieur le Maire a pondu un arrêté qu’il a fait porter à tous les habitants de Saint-Ricart, au terme duquel il est désormais interdit de sortir de chez soi, sauf à être porteur d’une attestation de déplacement dérogatoire pour aller boire un coup chez l’Evelyne avec le Guitout !
Est-ce que cette consigne sera respectée ?
La question reste posée vu que le maire ne dispose, à ce jour, d’aucune police municipale.
Quant à Francis, il s’est fendu d’un très beau poème dédié à ses compagnons de scène et je ne résiste pas au plaisir de vous le communiquer tel que je l’ai reçu :
Guitout
L’corona est arrivé
Et la Evelyne elle a fermé
Depuis c’temps-là mon vieux Guitout
Et ben mon gars y tire du cou.
Jack (le conservateur)
L’corona est arrivé
Et not’ musée il est fermé
Et ben mon Jack est embêté
Car il ne peut plus fayoter
L’Maire
L’corona est arrivé
Et la cantine elle est fermée
Pour les p’tits pois ben c’est foutu
D’la cantinière y verra plus l’c...
(précisons pour le lecteur que le Maire a réputation d’aller compter les p’tits pois en compagnie de la cantinière)
Au final, on peut dire qu’il y a de l’idée. Certes, ce n’est pas du Verlaine, ce n’est pas du Rimbaud, mais c’est tout de même de la rime riche. Bravo Francis Mendez ! Il a fallu ce confinement pour que son talent explose.
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